Oran, une Ville, une Vie.

Oran, une Ville, une Vie.

Dernier adieu à Oran.

 

A La Sénia, aéroport d'Oran,les militaires étaient en armes près des frises de barbelés. Nous avons franchi les barrières, je les ai regardé fixement alors qu'elles allaient se refermer derrière moi. On nous avait dirigé vers des camions militaires sous une escorte de CRS.

De l'autre coté de l'aéroport, dans les salles d'attente, des personnes s'entassaient partageant leur espace comme elles partageaient  leur désespoir.

Entourés d'amoncellement de valises, de paquets ficelés à la hâte et de milles  emballages de fortune, tous ces gens attendaient anormalement figés. La foule impressionnante par son silence montrait des visages graves.

J'avais préféré détourner les yeux. Cette atmosphère de détresse s'incruste encore aujourd'hui dans ma mémoire.

Il était 19 h, le soleil était encore très haut dans le ciel, il faisait très chaud et la lumière était intense, éblouissante. De mémoire, c'était peut-être la plus belle journée vécue en Algérie. C'était comme si la vierge de Santa-Cruz , dans un dernier adieu, avait envoyé sur Oran toute sa lumière.

Une centaine de jeunes gens attendaient, silencieux et en file indienne, au pied d'un avion, et toujours sous la surveillance de CRS.

Puis, l'ordre avait été donné de monter dans l'avion. Chaque garçon respectait le silence des autres et chaque pas sur la passerelle devenait de plus en plus lourd.

Certains, avant de s'engouffrer dans l'avion, se retournèrent une dernière fois, parfois un geste d'adieu, d'autres ne voulurent pas regarder en arrière.

Une fois dans l'avion, le temps avait paru très long avant le décollage.

Puis l'avion s'était mis à rouler doucement face à la piste, … et puis brusquement dans un bruit étourdissant une accélération et le décollage.

« ça y est, on n'était plus sur terre…. sur la terre de notre pays ,on n'était plus sur notre terre natale ».

Là-haut, on avait tous envie de voir Oran une dernière fois. C'était magnifique, le silence était total, pas un bruit, pas une parole , j'avais juste entendu quelques mots prononcés comme dans un murmure : « putain, qu'est-ce que c'est beau ! ».

La montagne de Santa-Cruz était sur le coté puis derrière nous, l'avion s'était dirigé tout droit au dessus du port (peut-être survolé ma maison).

 A travers les brumes de ma vue, en-bas Oran n'était plus qu'une tache floue, et plus rien …..que l'immense mer d'un bleu écarlate.

Au dessus de la mer, je me souviens avoir fermé les yeux.

Plongé dans mes pensées, des images se sont mises à défiler, des images de ma vie à Oran ……. 

 

Je me souviens, encore, très bien de ce 8 JUIN 1962 où depuis ce jour là, on m'appela : ........  « PIEDS-NOIRS ». 

 

 

 

 

 



03/05/2008
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi