Oran, une Ville, une Vie.

Oran, une Ville, une Vie.

Le départ

Cette nuit là, j'étais resté éveillé, les yeux ouverts sur la nuit.

Oran non plus ne parvenait pas à trouver le sommeil . Les bruits sourds d'explosion et le crépitement des mitraillettes n'avaient cessé toute la nuit. Oran n'abdiquait pas.

Diane, ma petite chienne, était venue s'allonger à côté de moi. Des lueurs filtraient à travers les rideaux et les persiennes, portant jusqu'à moi le désespoir de ces hommes qui n'arrivaient pas à comprendre ce qui s'était passé. Le drame s'était déroulé trop vite. Ils n'avaient pas eu le temps d'imaginer un autre avenir que déjà il s'était écroulé.

Je revivais ces derniers jours, et je cherchais dans le déroulement des événements, les causes qui en avaient déterminé le cours et précipité l'issue.

A présent, tout était brisé, saccagé. De nos projets et rêves d'enfant, il ne restait rien. Et la partie cette fois, semblait irrémédiablement perdue.   

Quand le jour s'est levé, Oran avait retrouvé le calme. On n'entendait plus que le chant des oiseaux.

Diane avait passé la nuit près de moi, ce qui n'était pas dans ses habitudes. Ma main s'était mise à la caresser, son poil était doux. Elle m'apportait un peu de réconfort et de courage pour ce qui allait être le jour le plus long.

Les derniers moments, à la maison, ont été difficiles. Ma mère pleurait sans s'arrêter, mon père semblait ailleurs et mon frère les traits du visage durs, la mâchoire serrée comme pour maîtriser sa colère, ses mouvements étaient brusques et retenus à la fois.

Un taxi, (un ami de mon père) devait me prendre et m'amener à la caserne d'Eckmül. La ville bloquée par les barrages et les contrôles nombreux, il n'avait pas pu arriver à l'heure prévue.

Un voisin s'était, gentiment, proposé de me déposer à la caserne d'Eckmül.

Nous étions descendus tous ensemble les trois étages de l'immeuble, je tenais ma mère par le cou.

La lueur de la rue m'avait surpris et ébloui un instant. La voiture était devant l'immeuble.

J'affichais une certaine sérénité, mais cela n'était que du bluff. Il n'était pas question que je laisse apparaître mon trouble.

Avant de monter en voiture, je me suis retourné pour regarder encore une fois ma rue, cette rue qui m'avait donné tant de joie dans l'insouciance de mon enfance.

Des voisins étaient là, discrets. Par pudeur, ils se tenaient à l'écart . je leur ai fait un signe d'adieu. Ils voyaient partir un des enfants du quartier, un des petits « garnements ».

Une dernière fois, j'ai enlacé tendrement ma mère et pour ne pas qu'elle voit mon émotion, je m'étais engouffré brusquement à l'arrière de la voiture au coté de mon frère.

A travers les vitres de la voiture, mes yeux ne voyaient plus que ma mère et mon père se tenant par la main. Quel désespoir pour eux de voir partir ainsi leur enfant…. quelle déchirure !   

 

 

 

 

 

 




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